Hemeris initie son passage à l’échelle avec un premier site industriel capable de traiter plusieurs tonnes de semences par jour.

Interview de Steven Deves-Girain, fondateur d’Hemeris

Logo Hemeris
Logo d'Hemeris

Fondée en 2021, Hemeris s’inscrit dans une démarche agroécologique et propose une alternative innovante pour une agriculture plus propre. La startup développe un procédé unique de décontamination des semences par plasma froid, capable de tuer bactéries, virus et champignons sans recours aux produits chimiques et chlorés. Cette approche permet non seulement d’améliorer la germination des semences, mais aussi de préserver la qualité des sols et la biodiversité en  intervenant au tout début de la chaîne agro-industrielle, là où se décide la qualité de toute la production alimentaire.

En effet, l’agro-industrie actuelle repose largement sur des produits chimiques : en France, 98 % des sols agricoles contiennent des résidus de pesticides, et certains échantillons présentent jusqu’à 33 substances différentes (EEA, 2023). Cette dépendance menace la fertilité des sols, la santé humaine et la biodiversité, tout en limitant la diversité des semences mises en culture. 

C’est dans ce contexte qu’Hemeris a vu le jour. Selon Steven Deves-Girain, fondateur : « Tout ce que nous mangeons part d’une semence. Agir dès cette étape permet de produire du pain, nourrir les animaux et, plus globalement, de transformer l’agro-industrie pour réduire son empreinte chimique. »

FoodBiome a travaillé main dans la main avec Steven, avant même la création du projet et a ainsi contribué à structurer les premières étapes de son développement – de l’amorçage à la levée de fonds – du laboratoire pilote aux prémices de l’échelle industrielle. En 2025 et avec son premier site industriel à Villebon-sur-Yvette, Hemeris est désormais capable de traiter plusieurs tonnes de semences par jour, s’affirmant alors comme un acteur clé du marché mondial de l’agro-tech.

Photo de Persil décontaminé par plasma

Bonjour Steven, peux-tu partager à nos lecteurs la genèse du projet Hemeris ?

Bien sûr ! 

Le projet Hemeris est né de mes travaux en école d’ingénieur sur les plasmas froids pour la désinfection bactérienne dans le domaine médical. Après un problème de contamination de tomates en France en 2020, j’ai compris les enjeux sanitaires et économiques liés aux semences. L’ambition d’Hemeris fut dès le départ de proposer une alternative viable aux solutions chimiques et de contribuer à un changement écologique dans l’agro-industrie.

Super ! Peux-tu expliquer la technologie derrière le projet ? 

Il existe 4 états : solide, liquide, gazeux, l’état plasma est le quatrième. C’est sur ce dernier que repose notre technologie qui utilise de l’air à qui on donne de l’énergie électrique pour créer un plasma qui modifie temporairement sa composition chimique. C’est ensuite ce gaz modifié qui est appliqué aux semences pour tuer les pathogènes (bactéries, champignons, virus) sans altérer les semences ni laisser de résidus chimiques. La force de cette technologie est d’offrir un traitement sec et homogène, ce qui est crucial car, à l’inverse, l’eau peut abîmer les semences, les faire germer et altérer leur conservation.

La physique de cette méthode représente donc une rupture par rapport aux techniques classiques qui utilisent des produits chimiques (chlorés, acides, antifongiques, antibiotiques, javel) ou d’autres traitements qui peuvent dégrader les semences et les sols.

Notre technologie robuste garantit ainsi un bon passage à l’échelle. Je prends souvent cet exemple, mais quand je traite 1 kg de semence de tomate, ça vaut vite plus de 200 k€. Alors imaginez si on fait perdre 5 % de germination à ce kilo là, c’est finalement beaucoup de valeur qu’on ne peut pas se permettre de perdre.

Et quel est le modèle d’Hemeris ?

Aujourd’hui, nous fonctionnons sur un modèle de service : les semenciers nous envoient leurs semences contaminées, que nous testons et décontaminons avant de les renvoyer. La prestation est tarifée au kilo, avec des délais variables selon la variété : le plus rapide est le radis, le plus lent est le persil.

À terme, nous pourrions développer un modèle Factory as a Service, avec des unités déployables directement chez les clients, facturées à l’heure. Cela concernerait multiplicateurs de semences et semenciers, ou des zones de production spécifiques. La maturité industrielle nécessaire est d’ailleurs en cours de consolidation avec notre première usine de 440 m² à Villebon-sur-Yvette, complétée de plus de 110 m² de bureaux où nous avons conteneurisé notre réacteur à plasma pour faciliter l’envoi et l’installation chez nos clients.

Ainsi, cette infrastructure permet de mettre à l’échelle toute l’innovation Hemeris et de passer d’un modèle de laboratoire assez artisanal ne traitant que quelques grammes de semences par jour à une production industrielle capable de traiter une tonne par jour d’ici mi-octobre 2025, avec un objectif de cinq tonnes par jour début 2026 ! 

Photos de la première usine Hemeris à Villebon-sur-Yvette
Modélisation du premier réacteur

Intéressant ! Aujourd’hui, Hemeris est capable de traiter tous types de semences ? 

Alors – Nous pouvons traiter beaucoup de couples de semence pathogène. Aujourd’hui, nous nous concentrons  sur les semences à haute valeur ajoutée comme les haricots, carottes, radis, betteraves, certaines herbes aromatiques, oignons…

La récente levée de fonds financera prioritairement cette mise à l’échelle des procédés et l’élargissement du catalogue de semences et de pathogènes traités. Les fonds permettront également de rendre plus robuste notre technologie et d’envisager le coup d’après :  commencer à faire des volumes en développant des unités de décontamination facilement déployables à l’international et utilisables par des externes, avec un très faible coût de maintenance et une supervision à distance.

De beaux projets … alors, que peut-on te souhaiter pour la suite ? 

Réussir l’industrialisation ! Un beau déploiement national et international, l’approfondissement de partenariats stratégiques et le traitement des tonnes et des tonnes de semences, parce qu‘in fine c’est toujours ça de chimie en moins qu’on met dans nos sols !

Très bien, merci beaucoup Steven !

💡L’avis de FoodBiome

Chez FoodBiome, nous sommes convaincus qu’Hemeris développe une innovation déterminante pour les filières agricoles : une solution technologique peu énergivore, respectueuse de l’environnement et pertinente économiquement. En s’attaquant au tout début de la chaîne agro-industrielle avec la semence, Hemeris ouvre la voie à une agriculture moins dépendante de la chimie et plus résiliente face aux enjeux sanitaires et environnementaux. Nous sommes fiers d’avoir soutenu Hemeris dès les premières étapes de cette aventure et de continuer à l’accompagner dans son passage à l’échelle industrielle !