Le RECHO : Restaurer le monde en restaurant les Hommes

Entretien avec Vanessa Krycève, comédienne, cuisinière de formation et co-fondatrice de l’Association Le RECHO. 

Bonjour Vanessa, peux-tu nous parler de la genèse de ton projet associatif ?    

Avec plaisir. Le RECHO est né en réaction à une série d’actualités qui ont profondément chamboulé notre sentiment d’humanité et d’altérité. Il y a d’abord la crise migratoire que nous vivons, notamment depuis la guerre en Syrie en 2015, la photo du petit Aylan sur cette plage turque et puis les attentats de Paris le 13 novembre 2015. 

Conséquences de ces actualités, des milliers d’hommes et de femmes n’ont plus accès à l’accueil et l’hospitalité dans leur quotidien. Parce que la cuisine est depuis la nuit des temps et dans tous les pays, un précieux vecteur d’hospitalité, nous avons décidé avec 7 autres femmes de créer le RECHO pour “réparer cet accueil défaillant, cette peur croissante de l’Autre” grâce au langage universel de la cuisine, en organisant des repas ouverts à chacun.   

Depuis 2016, le RECHO a pour ambition d’apporter un peu de REfuge, de CHaleur et d’Optimisme. 

La cuisine telle que nous l’entendons, rassemble, fédère et crée du lien, elle conduit à la rencontre de l’Autre en mettant les humains dans un rapport d’égalité et d’horizontalité. Autour de la table il n’y a que des hôtes.”

Comment avez-vous lancé vos premières activités de repas partagés ? 

Nos premières actions ont eu lieu sur le camp de Grande Synthe en août 2016. Pendant 3 semaines, avec 60 bénévoles, nous avons cuisiné plus de 10 000 repas végétariens pour les migrants installés dans le camp (entre 800 et 1300 personnes). 

“Le 17 août 2016 a été une première : ce fût en effet la 1ère fois que réfugiés et bénévoles prenaient leur dîner ensemble autour d’une grande table dressée dehors, sous un soleil magnifique.”

Le Récho à Grande Synthe © alice barbosa

Ensuite, il y a eu le Festival Le Grand RECHO à Arras en 2018. Nous avons monté un restaurant éphémère solidaire qui a impliqué l’ensemble de la ville, pour recréer du lien et favoriser une intégration pérenne des populations réfugiées. Au-delà des dons en nature et du mécénat qui ont largement contribué au projet (à hauteur de 400 000€), on avait une trésorerie de 60 000 € pour un festival de 12 jours et on a réussi le challenge ! Les habitants d’Arras en gardent encore un très bon souvenir.

Festival Le Grand Récho à Arras ©Jérémie Croidieu

Depuis, nous trouvons des ancrages par nos restaurants éphémères à travers différents lieux. Il y a d’abord eu La table du RECHO à Paris dans le 16ème arrondissement, puis Le Bal par Le RECHO dans le 18ème arrondissement. Et depuis quelques mois, nous sommes installés au 211 à la Villette. Dans ces lieux, nous cherchons à chaque fois à créer du lien entre les habitants et réfugiés en insertion, et développer le vivre-ensemble par la cuisine.

La table du Récho © Jessie Galesne

Quel type de cuisine proposez-vous ? 

Notre positionnement est exigeant et engagé. 

Techniquement, et par mon expérience en gastronomie, je souhaite que notre cuisine soit créative et gourmande. Nous accompagnons et formons tous nos cuisiniers aux différents métiers de la restauration de demain, avec ce niveau d’exigence et d’engagement. 

De la graine à l’assiette, nous veillons également à notre impact global, et nous considérons que la cuisine est un puissant levier pour accélérer la transition durable dont notre société a besoin, aussi bien sur le plan écologique que social. 

Concrètement, nous avons une gestion suivie de nos fluides en cuisine, nous revalorisons nos déchets et nos invendus, et nous nous approvisionnons de produits paysans et locaux, issus de l’agriculture durable.

Plats cuisinés par Le Récho © Clémence Sahuc

Comment voyez-vous votre développement pour les prochaines années ? 

Aujourd’hui, nous avons deux activités et elles sont indissociables pour garantir notre développement et notre impact. 

La première s’exprime à travers nos restaurants éphémères, où nous organisons les actions nécessaires pour tisser du lien grâce à la cuisine (repas collectifs, ateliers “bien manger pour tous”, ciné débat, etc).  Notre objectif pour cette première activité est d’arriver à nous ancrer dans un lieu qui nous est propre.

La deuxième activité est celle des prestations auprès des entreprises, notamment par le service de traiteur. Cette activité se développe beaucoup ces derniers temps, et pour répondre à la demande, nous avons trouvé un laboratoire en Ile-de-France, pour augmenter nos capacités de production. 

En 2023, nous souhaitons accélérer et professionnaliser cette activité de traiteur, car elle est cruciale pour maintenir un équilibre économique avec notre activité de restauration qui subit de plein fouet les conséquences de l’inflation sur tous les plans (augmentation des charges, baisse de la consommation). 

 

L’avis de Foodbiome 

Par son ambition de recréer du lien humain grâce à la cuisine et au vivant, Le RECHO est une illustration des infrastructures associatives de proximité dont notre société a besoin pour se reconnecter au vivant, dans tous les sens du terme. 

Un engagement qui résonne directement avec notre vision et que nous souhaitons voir se développer sur tous les territoires ! 

Pour en savoir plus sur Le RECHO, rendez-vous sur leur site internet