Fiche de lecture – Une Seule Santé

Introduction

Nous avons lu le dernier ouvrage de Pierre Weill — Une Seule Santé, Enquête sur les sols où nos maladies prennent racine (Actes Sud, 2025). Ce livre fait écho à la mission de FoodBiome — restaurer le lien alimentation-territoire — car on y trouve une démonstration édifiante du lien qui unit la santé des sols, la santé des animaux et la santé des humains qui les mangent ; c’est la Santé Globale. Vous n’y trouverez point de jargon scientifique qui complexifie la compréhension du propos, au contraire le livre présente les résultats de 30 ans de recherches de façon pédagogique et accessible.

Pierre Weill est un ingénieur agronome et entrepreneur français, fondateur en 2000 de l’association Bleu-Blanc-Cœur. Cette association vise à promouvoir une agriculture respectueuse de l’environnement et à améliorer la qualité nutritionnelle des produits alimentaires. L’association encourage les pratiques agricoles qui favorisent la biodiversité et la santé des sols, tout en produisant des aliments riches en oméga-3.

Voici ci-dessous les 3 points-clés que nous retenons de la lecture du livre :

          1. Les oméga-3 jouent un rôle critique dans la bonne santé des animaux d’élevage

Il existe deux familles d’acides gras qui jouent des rôles antagonistes dans le fonctionnement des organismes. Les acides gras dits oméga-3 ont des fonctions anti-inflammatoires et contribuent à fluidifier le sang. Ils sont notamment fortement présents dans l’herbe qui est broutée par les vaches. Les acides gras dits oméga-6 ont à l’inverse des fonctions pro-inflammatoires et contribuent à épaissir le sang. Ils sont fortement présents dans le maïs, et notamment le maïs ensilage dont peuvent se nourrir les vaches. Seules les plantes savent synthétiser en masse des oméga-3 végétaux, qui sont ensuite transformés en oméga-3 animaux assimilables par l’être humain suite à son ingestion par des animaux (ex : vaches, poules).

L’impact positif sur la santé des animaux dont la ration est enrichie en oméga-3 a été prouvé. En effet des fermes expérimentales qui ont intégré des graines riches en oméga-3 (lin) dans les rations ont pu observer des résultats positifs avec une baisse des maladies métaboliques et une baisse des frais de vétérinaires associés.

          2. Les humains se nourrissant de produits animaux ayant bénéficié d’un régime alimentaire riche en oméga-3 sont en meilleure santé

L’impact d’une alimentation enrichie en oméga-3 sur les animaux a pu se mesurer rapidement. En 35 jours de régime alimentaire modifié, Pierre Weill a observé la présence 40% d’oméga-3 en plus dans le sang des volontaires ayant participé à l’expérience par rapport au groupe témoin. Plusieurs autres expérimentations sont venues étayer ces premiers constats. Des personnes obèses ayant consommés des produits Bleu-Blanc-Coeur (produits labellisés riches en oméga-3), ont repris 5 fois moins de poids après en avoir perdu en début d’expérimenation, que les personnes du groupe contrôle. Le taux d’insuline de personnes diabétiques a significativement baissé suite à un changement de régime alimentaire riche en oméga-3. Le lait des femmes allaitantes se nourrissant de produits Bleu-Blanc-Coeur contient 49% d’oméga-3 en plus que le groupe témoin. 

Cependant, tout est question d’équilibre, un forçage trop fort en oméga-3 n’apporte plus de bénéfices mesurables. Le corps humain ayant aussi besoin des oméga-6, pro-inflammatoires qui fonctionnent comme un mécanisme de défense du corps humain.

          3. Les pratiques agricoles et alimentaires constituent le socle fondamental de la Santé Globale

Pour avoir des animaux qui se nourrissent de rations diversifiées dont se nourriront in fine les humains, il est nécessaire de mettre plus de diversité et de variété dans les paysages agricoles, et de remettre au goût du jour la culture de graines anciennes comme le lin par exemple ou encore de légumineuses. Il est également nécessaire que les sols cultivés reçoivent le moins de chimie possible (tendre vers l’agriculture biologique) et le moins de travail du sol possible (tendre vers l’agriculture de conservation des sols). Comme le mentionne Pierre Weill :

“Des plantes capables de bien se défendre seules contre leurs agresseurs seront riches en nutriments microbiens, antioxydants et anti-inflammatoires qui sont les éléments mesurables de base de la santé unique dont la santé humaine est le point d’orgue.”

Mais sans engagement des consommateurs, ou plutôt des mangeurs, les efforts de l’amont agricole ne pourront pas déployer leur plein potentiel. S’intéresser à sa santé, s’est d’abord s’intéresser à ce que l’on mange, en favorisant une alimentation diversifiée et peu transformée. En effet, “ce que nous mangeons nous constitue” ; cette phrase chère à Arnaud Daguin (ancien chef étoilé et conférencier ayant contribué à la création de FoodBiome) que l’on retrouve dans le livre de Pierre Weill nous rappelle que notre corps se forme et se régénère à partir de ce qui rentre 3 fois par jour dans notre estomac. “Bien se nourrir, c’est renforcer sa résistance aux maladies et diminuer les traitements curatifs.”

Conclusion

La vie sur Terre vient du Soleil ; les plantes convertissent l’énergie solaire en énergie organique qui la rend disponible pour la myriade d’êtres vivants qui peuplent la Terre, dont les humains font partie intégrante. Pour que cette énergie solaire initiale, transformée successivement par les différents intermédiaires plantes et animaux avant d’arriver à l’être humain, contribue à la bonne santé des humains, c’est en réalité la santé complète de la chaîne qu’il faut considérer. Il n’y a pas de bonne santé humaine, sans santé des sols, des plantes, des animaux. La force de la démarche exposée dans le livre tient à l’exhaustivité des expériences réalisées, sur les plantes, les animaux, les être humains, dans des situations expérimentales souvent complexes à mettre en œuvre.

Le propos de Pierre Weill nous invite donc à réfléchir, car cette Santé Globale ne pourra advenir sans une reconnexion émotionnelle, sensorielle des mangeurs avec leur alimentation. C’est la mission que FoodBiome s’est fixée — restaurer le lien alimentation-territoire — mission qui voit progressivement le jour en ce moment grâce à l’émergence foisonnante de projets variés comme des ateliers de transformation alimentaire locaux, des tiers-lieux nourriciers, jardins partagés, de la restauration de saison, des écoles de cuisine. Ces différents projets participent chacun à leur façon à faire une partie du chemin de cette reconnexion à notre alimentation et aux territoires dont elle provient.

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