Alancienne livre à domicile des produits agroécologiques

Entretien avec Paul Charlent, cofondateur d’Alancienne.

Bonjour Paul, est ce que tu peux nous présenter le concept d’Alancienne ?

Avec plaisir ! Nous livrons à domicile des produits bio, frais et durables, sourcés en direct auprès de producteurs locaux engagés en agroécologie. Tout se fait dans la journée : les produits sont cueillis le matin, acheminés par nos transporteurs jusqu’à nos locaux d’empaquetage, et livrés le soir même chez les clients, via des scooters ou camions électriques.

Ce modèle permet de faciliter les circuits courts de l’amont à l’aval : Côté producteur, il lui permet de cueillir et préparer uniquement ce qui a été commandé, le libère de la coûteuse gestion logistique, et lui offre un débouché supplémentaire. Côté client, il facilite l’approvisionnement local en lui offrant la flexibilité de commander ce qu’il souhaite via notre site, jusqu’à la veille pour le lendemain et sans abonnement. 

Il permet également de minimiser le gaspillage en nous évitant d’avoir à stocker des produits dans notre entrepôt : le stock se trouve directement dans les champs !

Team
(© Le Parisien)

Comment se passe le sourcing et la relation avec les agriculteurs ?

Nous les sélectionnons en fonction de la qualité de leurs produits et des pratiques agroécologiques qu’ils adoptent. Nos 3 ingénieurs agronomes auditent chaque ferme, qui sont toutes en bio ou en conversion, tendent au maximum vers l’autonomie et aspirent à des pratiques vertueuses pour la nature, la biodiversité et les Hommes. Sur le site de Paris par exemple, nous travaillons avec une centaine d’agriculteurs dans un rayon de 200 km, et de nouveaux sont intégrés chaque semaine, ce qui nous permet de proposer environ 600 références de produits de saison tout au long de l’année.

Une vraie relation de confiance et de collaboration est établie avec nos producteurs partenaires. Ce sont eux qui fixent leurs prix et les font évoluer en fonction de leurs contraintes, et nous garantissons que 60% du prix de vente final leur revienne. Nous travaillons également avec eux sur leurs plans de cultures pour sécuriser au maximum leurs débouchés, et interagissons constamment pour améliorer nos pratiques respectives.

Comment est né Alancienne ?

Mes parents m’ont transmis très tôt le virus de la cuisine, et c’est moi qui préparais souvent les repas à la maison. Quand je me suis rapproché des producteurs locaux de ma région pour trouver de bons produits, je me suis rendu compte des injustices auxquelles ils faisaient face. Je me suis dit que le monde ne tournait pas rond et j’ai cherché une façon de changer les choses. C’est pendant notre cursus à Berkeley, avec Alexis, Augustin et Livio (co-fondateurs du projet), que les circuits courts se sont présentés comme une partie de la solution, pour redonner du pouvoir aux agriculteurs, supprimer un maximum d’intermédiaires et initier tout un travail éducatif autour de l’alimentation. Nous avons créé Alancienne dès notre retour en France, en 2016.

Ce volet éducatif est important pour vous ?

Complètement. Nous l’avons opéré dès le début, et pensons que c’est aussi notre rôle de rendre l’agroécologie et l’agriculture les plus accessibles possible au grand public.

Nous avons une chaîne Youtube sur laquelle nous racontons les histoires et techniques des producteurs, vulgarisons les notions de saisonnalité, de résilience alimentaire, l’importance des légumineuses, les problématiques liées au calibrage… Cela permet à nos consommateurs de mieux comprendre et d’accepter que les asperges qu’ils reçoivent soient parfois un peu biscornues, ou encore que notre catalogue soit réduit en hiver.

En plus de notre contenu sur Youtube, nous avons participé en 2017 à la réalisation du film “On a 20 ans pour changer le monde” d’Hélène Médigue, un documentaire qui suit des jeunes dans leur parcours d’agroécologie et montrent qu’un autre monde est possible.

Pour rendre plus concrètes toutes ces ressources qui sont en ligne, nos agriculteurs partenaires organisent une fois par an des portes ouvertes à la ferme, pour présenter leur exploitation et leur savoir-faire, ce qui participe également à acculturer le grand public aux pratiques agricoles et à recréer ce lien fragile et précieux entre les producteurs et les consommateurs.

La Ferme de l’Envol (Sources photos : Coeur d’Essonne Agglomération, Fermes d'avenir et Alexandre Guirkinger)

Peux-tu nous parler de la ferme de l’Envol ?

Nous avons monté cette ferme expérimentale de 60 ha à Brétigny sur Orge en Essonne, qui se veut être un démonstrateur d’une agroécologie productive, rentable et réplicable. 

Depuis 2 ans, nous fonctionnons selon un système de polyculture-élevage incluant du maraîchage mécanisé, de l’arboriculture avec plus de 3 000 arbres fruitiers et la présence de brebis d’éleveurs partenaires. Le fait de mêler cultures et élevage nous permet d’atteindre un modèle économique rentable et de tendre vers une autonomie complète du système, notamment en termes de matière organique. Nous faisons en sorte d’être le plus vertueux possible dans nos pratiques agricoles pour démontrer la performance des fermes agroécologiques. Tout est produit en bio, sans intrants ni produits phytosanitaires, et nous favorisons les rotations de légumineuses et la réintroduction de variétés anciennes dans nos cultures. 

Nous nous sommes organisés sous forme de SCIC (Société Coopérative d’Intérêt Collectif) pour porter financièrement le projet et inclure toutes ses parties prenantes, notamment les maraîchers, les distributeurs et restaurateurs partenaires, ainsi que les investisseurs et les entités publiques (Agglomération Coeur Essonne). Aujourd’hui les produits issus de la ferme sont disponibles sur le site d’Alancienne, dans trois AMAP partenaires, et alimentent également une cantine scolaire locale et plusieurs restaurants parisiens comme Le Septime ou Frenchie.

Cette ferme a aussi pour vocation d’être un lieu d’expérimentation, qui permette d’améliorer nos pratiques et d’enrichir nos connaissances en termes d’agroécologie, de faire des tests de nouvelles semences, de nouvelles variétés, et de nouveaux fonctionnements sociaux et économiques. Par exemple, nous avons lancé un système de revenu de 2600€ net par mois pour nos agriculteurs, pour inciter des jeunes générations à se lancer et à innover, et essayer entre autres de les libérer de cette dépendance aux subventions pour vivre de leur métier.

Quelles sont les prochaines étapes pour vous ?

Nous venons d’ouvrir notre troisième site en région bordelaise, qui compte déjà une trentaine de producteurs partenaires et s’ajoute à ceux de Lyon et Paris. A plus long terme nous souhaiterions essaimer le modèle dans d’autres villes et développer d’autres fermes comme celle de l’Envol, pour montrer qu’un autre schéma d’agriculture vertueuse est possible, rentable et réplicable. C’est ainsi que nous pourrons toucher des bassins de population plus importants, adresser la restauration collective et la distribution par exemple, et faire de l’agroécologie et des produits locaux la norme dans notre système alimentaire.

L’avis de FoodBiome : 

Le passage à l’échelle des circuits de proximité nécessite un maillage de nouveaux intermédiaires pour reconnecter les bassins de production et de consommation. Le service proposé par Alancienne permet de créer ce lien direct entre producteurs et consommateurs engagés, facilitant ainsi l’approvisionnement local.

En plus de leur offrir un débouché supplémentaire et une juste rémunération, Alancienne décharge les agriculteurs de la gestion logistique et co-construit avec eux un partenariat durable qui va au-delà de la simple vente de produits, en les encourageant et les accompagnant dans leurs pratiques agroécologiques. Leur ferme pilote de l’Envol constitue à ce titre un exemple inspirant de modèle agricole vertueux, productif, et rentable, qui démontre qu’une autre façon de se nourrir est possible. 

Leur approche écosystémique et leur envie d’essaimer des modèles de production et de distribution durables, font d’Alancienne un acteur inspirant dont FoodBiome partage la vision, et que nous comptons parmi les acteurs clé du déploiement des circuits de proximité. 

Pour en savoir plus sur Alancienne, visitez leur site

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