La Ceinture Verte réimplante du maraichage en périphérie des villes

Entretien avec Pierre Pezziardi, fondateur de La Ceinture Verte

 

Bonjour Pierre, peux-tu nous présenter ce qu’est la Ceinture Verte ?

La Ceinture Verte est née du constat qu’aujourd’hui, s’installer en maraîchage est un parcours du combattant. Il faut pouvoir avoir accès au foncier, réunir une mise initiale importante pour l’équiper, et trop souvent accepter de gagner très peu d’argent au début. Et pourtant la demande pour des fruits et légumes bio de proximité est là. Et l’enjeu est de taille, sachant que 50% des agriculteurs partent à la retraite dans les 10 prochaines années. De plus, de nombreuses collectivités se retrouvent à la peine pour remplir les objectifs EGALIM de 50% de produits de qualité et durables, dont au moins 20% de produits biologiques, en restauration collective (ou les satisferont en important la valeur ajoutée d’autres territoires). Nous apportons une réponse à ces problématiques-là. Concrètement, nous accompagnons des maraîchers à l’installation en bio sur un parcellaire de 2 ha de SAU environ dont 1500m2 de surfaces sous abri. Le but étant de constituer des grappes de plusieurs unités de 2 ha de SAU. Notre ambition est de relocaliser 10% de la consommation de fruits et légumes frais, ce qui correspond environ à 15 000 nouvelles fermes à l’échelle nationale.

Quel accompagnement et quels services fournissez-vous aux maraîchers ?

Nous levons 3 freins pour massifier la création d’exploitations maraîchères.

Premièrement l’accès au foncier : La Ceinture Verte achète et loue le foncier aux maraîchers. Mais elle ne le fait pas seule. Nous créons des Sociétés Coopératives d’Intérêt Collectif (SCIC) sur chaque territoire d’implantation, dans lesquelles sont associés les collectivités, des partenaires (ex : GAB, CIVAM, ADEAR), les maraîchers installés, des investisseurs solidaires, et La Ceinture Verte. Ce sont ces SCIC qui portent l’investissement sur le foncier. C’est d’ailleurs la clé de la réussite de notre modèle, car l’acquisition de foncier ne peut se faire à l’échelle sans une volonté politique forte des territoires avec lesquels nous travaillons. La SCIC permet de les y associer. 

Deuxièmement, nous fournissons de l’expertise technique et commerciale aux maraîchers. Une équipe d’agronomes accompagne les maraîchers sur leurs itinéraires techniques. Une équipe commerciale les aident à vendre leur production. Et sur ce point, nous diversifions les canaux de vente. Il y a de la vente directe mais aussi de la vente à des acteurs locaux types légumeries.

Troisièmement, nous finançons et installons les infrastructures indispensables telles que l’irrigation, les tunnels, la chambre froide, la station de lavage et de conditionnement. Il faut maximiser les chances de réussite à l’installation, et permettre aux maraîchers de se concentrer sur le développement de leur production.

Parcelles maraîchères à Meillon en Pyrénées Atlantiques

Comment gagnez-vous de l’argent ?

La Ceinture Verte n’est pas qu’une seule entité, mais en réalité plusieures. Il y a la Ceinture Verte Groupe qui porte l’expertise technique et commerciale, et qui s’occupe du développement de l’entreprise. Ensuite il y a les SCIC sur chaque territoire. Le maraîcher verse à la SCIC une cotisation mensuelle et une commission à partir d’un certain niveau de chiffre d’affaires. La SCIC a un contrat de prestation de service avec La Ceinture Verte Groupe pour rémunérer les services d’aide à l’installation et l’accompagnement. Les SCIC portent tous les investissements locaux, et reçoivent les subventions.

Où en êtes-vous dans le développement et quelles sont les prochaines étapes ?

Nous avons fini la première phase, avec au bout d’un an 8 fermes installées sur deux territoires pilotes, à Pau et Valence. 5 maraîchers sont actuellement en activité. Le premier enjeu est de développer le CA par maraîcher. Parvenir le plus rapidement possible à un premier palier de 40 k€ de CA pour dégager un SMIC, puis l’augmenter progressivement, le potentiel pouvant atteindre 120 k€ par ferme. Le deuxième enjeu est de s’implanter sur d’autres territoires, nous avons des discussions avancées avec Le Havre, Caen, Clermont-Ferrand ou Lorient, et une 3e coopérative vient d’être créée le 30 septembre à Limoges. Troisièmement, nous développons une suite d’outils au service du déploiement des maraîchers. Un outil de formation, comme une sorte de Wikipédia du maraîchage. Un outil de planification de la production, avec un benchmark intégré pour pouvoir s’inspirer des meilleurs. Nous travaillons aussi étroitement avec l’Atelier Paysan, qui développe des outils en auto-construction et partage cette approche open-source.

L’avis de FoodBiome

La Ceinture Verte est parfaitement alignée avec la mission de FoodBiome, de restaurer le lien alimentation-territoire. Elle répond au premier des quatre défis (En savoir plus sur les 4 défis)
que nous avons identifiés, sur la réimplantation de fermes maraîchères et polyculture-élevage. En implantant des SCIC sur chaque territoire, LCV a trouvé une façon intelligente de réconcilier la nécessaire massification du savoir-faire et de l’expertise technico-commerciale dans LCV Groupe, et la démassification des unités de production en micro-parcelles de 2 ha de SAU, pour s’adapter au mieux au contexte de chaque territoire.

En savoir plus sur la Ceinture Verte sur leur site.

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