Ramdam Social : lutter contre la précarité alimentaire à travers les achats du quotidien

Entretien avec Julie Boureau, co-fondatrice de Ramdam Social

Bonjour Julie, peux-tu te présenter et nous raconter la genèse du projet Ramdam Social ?

Bien sûr ! Je m’appelle Julie, et avec mon associé Luc-Olivier, nous avons lancé Ramdam Social en 2023. Tous les deux, nous venons du monde de l’agroalimentaire : j’ai travaillé pendant des années chez Innocent et Happyvore, et Luc-Olivier a eu un parcours axé sur l’impact social, notamment chez Too Good To Go. Nous avons toujours été animés par l’envie de faire plus que simplement vendre des produits : nous voulions utiliser nos compétences pour avoir un impact concret, notamment sur les questions sociales.

L’idée de Ramdam est née en réponse à une situation que nous ne pouvions plus ignorer. Aujourd’hui, en France, 1 personne sur 3 peine à se procurer trois repas par jour, et cela dans un pays pourtant riche et avec des excédents alimentaires. En parallèle, 67 % des Français, soit 45 millions de personnes, souhaitent s’impliquer pour lutter contre la précarité alimentaire, mais ne savent pas toujours comment faire ou manquent de temps pour s’engager de manière régulière.

Face à cette contradiction, nous avons pensé à une solution simple et accessible à tous : pourquoi ne pas transformer les courses alimentaires, un acte quotidien et nécessaire, en un levier solidaire ? C’est comme ça que nous avons eu l’idée de Ramdam Social. L’idée est de permettre à chacun de contribuer à la lutte contre la précarité alimentaire tout en achetant des produits de qualité. Avec chaque achat d’un produit Ramdam, une partie du chiffre d’affaires est directement dédiée à financer un repas ou un encas pour une personne en difficulté. C’est un modèle gagnant pour tout le monde : les consommateurs achètent des produits gourmands et responsables, et en même temps, ils aident à nourrir ceux qui en ont besoin.

Photo 2 - RamDam
Julie Boureau et Luc-Olivier Pieret, co-fondateurs de l’entreprise Ramdam Social (source : Ramdam)

Comment avez-vous concrètement mis en place ce modèle de solidarité via les produits que vous proposez ?

L’un des points clés pour nous était de créer un modèle simple et transparent. Lorsqu’un consommateur achète un produit Ramdam, deux choses se passent. Premièrement, il achète un produit de qualité, fabriqué en France avec des ingrédients locaux autant que possible. Prenons l’exemple de nos chips : elles sont produites à Guérande, avec des pommes de terre cultivées à moins de 60 km de l’usine, de l’huile locale et du sel de Guérande. Deuxièmement, cet achat cofinance un repas ou un encas pour une personne en difficulté, via nos partenaires associatifs.

L’idée est de permettre à chaque achat quotidien d’avoir un impact immédiat. Concrètement, cela peut être un bol de soupe, un biscuit ou une boisson chaude distribuée lors des maraudes de nuit du Samu Social, ou bien dans leurs haltes de jour, des lieux où les personnes en situation de précarité peuvent trouver refuge pour se nourrir, se reposer, recharger leurs téléphones, etc. C’est une manière directe d’utiliser le pouvoir d’achat pour faire une différence.

Produits RamDam
Produits ramdam et repas co-financés (source : Ramdam)

Pourquoi avoir choisi des produits de snacking pour débuter ?

C’est une critique qu’on a beaucoup entendue au début : « Pourquoi des produits de snacking alors que vous luttez contre la précarité alimentaire ? ». L’idée, c’est que pour avoir un réel impact, il faut vendre beaucoup, donc des produits consommés régulièrement et par le plus grand nombre. Le taux de pénétration des chips en France est de 95 %, ça nous permet de toucher un large public. 

Notre objectif est de proposer des produits simples, de qualité, fabriqués en France, avec des ingrédients naturels, sans additifs ni conservateurs, et de redistribuer une grande partie de notre chiffre d’affaires pour des causes sociales. En effet, nous pensons qu’il est plus efficace de faire bouger les lignes sur des catégories de produits à forte consommation que de lancer des produits de niche que peu de gens achèteraient.

Ensuite, nous avons fait ce choix pour que le produit soit un plaisir. La solidarité ne doit pas être synonyme de contrainte ou de sacrifice. Avec Ramdam, nous voulons montrer qu’il est possible d’allier gourmandise et générosité. En plus, en choisissant des produits que les gens consomment déjà régulièrement, nous facilitons leur engagement. Pas besoin de changer leurs habitudes alimentaires, ils peuvent simplement acheter des produits qu’ils apprécient, tout en contribuant à une cause qui les touche. Ainsi, en choisissant des produits populaires et consommés fréquemment, nous avons pu cofinancer 120 000 repas en seulement quelques mois après notre lancement en 2024.

Gamme de produits RamDam
Gamme de produits alimentaires Ramdam Social (source : Ramdam)

Comment avez-vous structuré vos partenariats avec les associations ?

Dès le début, nous avons voulu impliquer les associations dans notre réflexion. Nous avons noué des partenariats solides avec des acteurs de la solidarité comme le Secours populaire, les Banques alimentaires et le Samu Social. Ces associations sont essentielles pour distribuer les repas que nous cofinançons.

Nous avons également réfléchi à une manière de leur apporter plus de stabilité. En tant qu’entreprise, nous avons la capacité de faire des prévisions de ventes à plusieurs mois. Cela nous permet d’anticiper les fonds que nous pourrons redistribuer. Par exemple, si nous savons que nous allons vendre tant de produits en septembre, nous pouvons garantir à nos partenaires qu’ils recevront un certain montant à la fin du mois. Cela leur offre une sécurité financière, car ils n’ont plus besoin de lancer constamment des campagnes de dons d’urgence.

Nous avons mis en place un système d’audit, à la fois pour nos produits et pour les associations. Nos ventes sont vérifiées par un expert-comptable accrédité, et les associations s’engagent à nous fournir des rapports sur la distribution des repas. Cette transparence est essentielle pour nous, afin de maintenir la confiance de tous les acteurs impliqués, y compris les distributeurs.

Acteurs et partenaires
Partenaires de Ramdam Social (source : Ramdam)

Aujourd’hui, on peut comptabiliser (à date du 20 septembre 2024) : 

  • Secours populaire Paris & Gironde : 33 088 portions de fruits & légumes offertes
  • Samu Social de Paris : 69 353 encas distribués 
  • Banques Alimentaires : 19029 portions de fruits & légumes co-financées 

Bénévoles des Banques Alimentaires et du Secours Populaire – Source Ramdam Social

À propos des distributeurs, quels sont vos canaux de distribution actuels ?

Nous avons eu la chance de bénéficier d’un bon accueil de la part des distributeurs. Carrefour Île-de-France a été le premier à nous faire confiance, ce qui nous a permis de lancer nos produits dans une centaine de magasins dès février 2024. Très vite, nous avons été rejoints par d’autres enseignes comme Franprix, Monop’ et Cora. Aujourd’hui, nous sommes présents dans plus de 700 points de vente, et nous espérons atteindre les 1000 d’ici la fin de l’année.

L’objectif est d’être présents partout où les consommateurs font leurs courses, que ce soit dans les grandes surfaces, les épiceries de quartier, ou même dans des circuits alternatifs comme La Tournée, qui fait du vrac. Nous avons aussi commencé à explorer d’autres canaux, comme les cinémas. L’idée est de rendre Ramdam accessible à un maximum de personnes, pour que chacun puisse contribuer à notre projet, quel que soit son mode de consommation.

À propos des distributeurs, quels sont vos canaux de distribution actuels ?

Nous avons eu la chance de bénéficier d’un bon accueil de la part des distributeurs. Carrefour Île-de-France a été le premier à nous faire confiance, ce qui nous a permis de lancer nos produits dans une centaine de magasins dès février 2024. Très vite, nous avons été rejoints par d’autres enseignes comme Franprix, Monop’ et Cora. Aujourd’hui, nous sommes présents dans plus de 700 points de vente, et nous espérons atteindre les 1000 d’ici la fin de l’année.

GMS

L’objectif est d’être présents partout où les consommateurs font leurs courses, que ce soit dans les grandes surfaces, les épiceries de quartier, ou même dans des circuits alternatifs comme La Tournée, qui fait du vrac. Nous avons aussi commencé à explorer d’autres canaux, comme les cinémas. L’idée est de rendre Ramdam accessible à un maximum de personnes, pour que chacun puisse contribuer à notre projet, quel que soit son mode de consommation.

carte des lieux Ramdam
Points de vente physiques des produits Ramdam Social (source : Ramdam)

Hormis Luc-Olivier, cofondateur, et toi, avez-vous d’autres salariés dans l’équipe Ramdam Social ?

Oui, nous avons structuré une petite équipe au fil du temps. Notre première embauche a été Marion, notre responsable logistique, qui nous a rejoints dès le début en novembre. Dès que les distributeurs ont commencé à nous faire confiance, nous avons vite compris qu’il fallait être irréprochables sur la gestion opérationnelle. Avec des producteurs différents, des entrepôts variés et des flux complexes à gérer, il était essentiel d’avoir quelqu’un pour garantir une exécution parfaite. Marion s’occupe de tout ce qui touche à la logistique, et cela nous a permis de sécuriser notre chaîne d’approvisionnement.

Nous avons aussi des équipes commerciales sur le terrain. Leur mission est cruciale : être présents dans les magasins, expliquer notre projet aux consommateurs, et s’assurer que les produits soient bien mis en avant. Le contact humain est primordial pour que les clients comprennent ce que représente Ramdam Social et l’impact qu’ils peuvent avoir en achetant nos produits.

Côté communication, nous avons également une équipe dédiée qui travaille sur la visibilité de Ramdam Social, que ce soit sur les réseaux sociaux, lors d’événements, ou même en lien avec nos associations partenaires. Leur rôle est de raconter notre histoire, de recréer du lien, et de sensibiliser toujours plus de gens à notre projet.

Aujourd’hui, l’équipe compte 13 personnes. Notre siège est à Bordeaux, où se trouve une partie de l’équipe, mais comme la plupart des magasins se situent en région parisienne, notre équipe commerciale est principalement basée à Paris. Nous passons beaucoup de temps sur le terrain, car pour nous, le lien avec les consommateurs et les partenaires est fondamental.

Comment réagit le public à votre initiative ? Étiez-vous préparé à cet accueil ?

Honnêtement, nous avons été surpris par l’engouement. Nous avions fixé un objectif de cofinancer 250 000 repas d’ici la fin de l’année 2024, mais au rythme où vont les choses, nous pensons dépasser cet objectif. Ce qui est très encourageant, c’est que nous voyons une vraie fidélité chez les consommateurs. Ils achètent nos produits, ils les apprécient, et ils reviennent.

Ce qui est aussi formidable, c’est l’effet collaboratif du projet. Dès le début, nous savions que nous ne pourrions pas y arriver seuls. Nous avons donc travaillé main dans la main avec les producteurs, les associations et les distributeurs, et chacun a joué le jeu. Nous recevons aussi beaucoup de soutien de la part des journalistes et des influenceurs, ce qui aide à faire connaître le projet. Mais il reste encore beaucoup à faire. Nous sommes conscients que nous ne sommes qu’une goutte d’eau dans l’océan des besoins.

400e site inauguré
Inauguration du 400e magasin partenaire (Source : Le Web de la Grande Conso - Olivier Dauvers)

Que peut-on vous souhaiter pour la suite ?

Notre plus gros enjeu est de nous faire connaître davantage. Nous n’avons pas les moyens de faire des campagnes publicitaires massives, donc nous comptons beaucoup sur le bouche-à-oreille et les médias pour expliquer notre démarche. Nous voulons que les consommateurs comprennent que leurs achats peuvent avoir un impact concret et immédiat.

Nous avons aussi des projets d’expansion. Nous espérons étendre notre modèle à d’autres catégories de produits. L’idée serait que tout le panier de courses devienne solidaire, pas seulement les chips ou les cookies, mais aussi des produits du quotidien comme les serviettes hygiéniques, le papier toilette, etc. Si nous réussissons à montrer que ce modèle fonctionne sur l’alimentaire, nous pourrons prouver qu’il peut s’appliquer à d’autres typologies de produits.

L’avis de FoodBiome

Ramdam Social est un exemple inspirant d’entreprise alliant impact social et consommation responsable. En transformant des produits du quotidien en levier pour lutter contre la précarité alimentaire, ils permettent à chacun de s’engager simplement, tout en garantissant une transparence totale sur la redistribution des fonds. Leur modèle innovant montre qu’une solidarité tangible peut émerger de nos choix alimentaires quotidiens. Cette initiative s’inscrit parfaitement dans notre mission de recréer du lien entre les populations et de favoriser des circuits solidaires durables.