La Récolte reconnecte les urbains à la Terre

Entretien avec Mathieu Mulliez, co-fondateur de La Récolte.

Bonjour Mathieu, peux-tu nous présenter le concept de La Récolte ?

La Récolte propose aux parisiens un autre modèle de production et de distribution alimentaire. Notre cahier des charges est très strict et n’a pas son pareil à Paris, de même pour la traçabilité qui est totale à La Récolte. Tous nos produits sont certifiés biologiques, de saison et achetés en circuit-court. En plus nous cuisinons au milieu du magasin, sous les yeux de nos clients, tout un tas de préparations maison exclusivement à partir  produits de la boutique.

Chaque magasin La Récolte a donc sa cuisine et chaque magasin achète ses produits directement aux producteurs, les équipes les connaissent bien, nous sommes en relation toutes les semaines en fait ! Les produits quittent donc les fermes et arrivent dans nos magasins directement, sans avoir été stockés ou manipulés, assurant une grande fraîcheur et des produits qui ont du goût, pour de vrai.

A La Récolte, la traçabilité est bien totale. C’est le fruit d’un gros travail et nous demande beaucoup d’énergie au quotidien encore mais c’est selon nous le seul moyen de la transparence et d’une grande qualité de produit. Ce sont les fondements de ce nouveau modèle de production et de distribution que nous proposons.

Aujourd’hui, nous avons 4 magasins à Paris : 18 boulevard des Batignolles, 108  rue du Chemin Vert, 43 rue Beaubourg et 100 rue Chardon Lagache. Nous prévoyons d’en ouvrir 3 supplémentaires d’ici fin 2022. Les clients peuvent y faire leurs achats sur place, ou récupérer leurs commandes passées en ligne via un système de click & collect. 

Que trouve-t-on au sein d’un magasin ?

Au travers de nos boutiques, nous proposons un assortiment de produits frais et de saison, a minima bio ou sauvages, issus de circuits courts. Nous souhaitons rendre accessible une alimentation saine et goûteuse aux populations urbaines, tout en les accompagnant dans leurs changements d’habitudes de consommation.

Nous proposons une offre très complète de produits frais et d’épicerie issue de l’agriculture biologique: des fruits et légumes bruts, viandes et charcuteries, des yaourts et fromages et un peu d’épicerie. En résumé, tout ce dont on a besoin pour faire ses courses et cuisiner des produits sains et de saison !
Notre cahier des charges va au-delà du bio, c’est à dire que nous faisons attention à ce que les semences des légumes soient non hybrides et que les fruits soient cueillis à maturité, ou que par exemple nous sommes attentifs à l’alimentation des animaux avec du bœuf nourri à l’herbe. En plus du label AB, ces critères identifient les modes de production qui donnent des produits riches en goût et nutritionnellement.

Les producteurs avec qui nous travaillons ont tous en commun d’avoir fait le choix d’une agriculture vertueuse au-delà du label AB.

En complément de cette offre de produits frais, nous disposons d’une cuisine au milieu de chaque magasin, dans laquelle nos chefs préparent tous les jours des plats faits maison pour mettre à l’honneur les produits de la boutique. Notre objectif est de faire redécouvrir à nos clients le plaisir de manger des aliments de saison, parfois oubliés ou dépréciés. Nous fabriquons ainsi nos propres terrines, biscuits, granolas maison… et proposons une offre de plats traiteurs prêts à consommer, confectionnés en partie à partir d’invendus de la boutique. Les récolteurs sont aussi là pour conseiller et inspirer les clients en leur donnant des idées de recette. A travers cette offre, nous souhaitons démontrer qu’il est possible de manger des plats de qualité, bio et bon, à des prix accessibles (8€ pour les plats, 2,8€ pour les desserts) lorsqu’on a peu de temps ou pas l’envie pour cuisiner.

Est ce que tu peux nous en dire plus sur vos approvisionnements ?

Nous sommes livrés plusieurs fois par semaine pour garantir une fraîcheur optimale. Le poisson arrive par exemple les mercredis et vendredis matin, car il a été pêché la veille ( nous n’avons que du poisson sauvage de pêche côtière). C’est aussi le cas pour les fruits et légumes : quand ils sont expédiés de chez nos producteurs, ils savent qu’ils seront vendus le lendemain en boutique. Tous les produits, comme les producteurs et les boutiques sont certifiés BIO.  Nous nous approvisionnons directement auprès des producteurs, avec qui nous entretenons un lien fort, pour conserver une fraîcheur optimale, une traçabilité totale, et pouvoir répondre à toutes les questions concernant leurs produits et soutenir leur travail.  Nous visitons d’ailleurs régulièrement leurs exploitations et ils viennent parfois nous rendre visite en magasin.

Comment t’est venue l’idée de créer La Récolte ? 

A la base, je ne suis pas du tout familier avec le monde agricole. Je suis issu d’une école de commerce, et j’ai travaillé pendant des années dans des domaines très différents. Mes rencontres et documentations personnelles m’ont amené à m’intéresser à l’agriculture et je me suis rendu compte des limites que présentaient les pratiques actuelles notamment vis à vis de l’utilisation de la chimie, de la considération du producteur… ça m’a paru anormal de fonctionner ainsi. Et puis j’ai découvert le fonctionnement du bio et de l’agroécologie, et j’ai eu envie de m’investir pour valoriser ces démarches. Alors en 2014, j’ai créé un premier magasin La Récolte à Paris, car j’étais, et je suis toujours, convaincu que pour manger autrement, il faut pouvoir faire ses courses de façon différente. Il est difficile pour urbains de s’approvisionner directement auprès des producteurs alors j’essaye, à ma façon,  de faire venir les producteurs à eux.

Quel est votre modèle économique ?

La modèle économique repose sur la complémentarité de l’offre de produits et celle de la cuisine au sein de chaque magasin. Les deux activités sont nécessaires et complémentaires: par exemple tout le travail de sourcing et de logistique réalisé pour la boutique permet de faciliter la cuisine. Cette dernière va alors permettre de valoriser tous les produits du magasin et notamment les invendus. Notre objectif à terme est d’atteindre le zéro déchet, et les problématiques de gaspillage et de recyclage font parties intégrantes de notre concept : nous sommes par exemple en partenariat avec Moulinot pour méthaniser et composter nos déchets organiques, et avec Lemon Tri pour le recyclage des cagettes en bois de nos producteurs.

Quelles sont les prochaines étapes ? 

En plus de l’ouverture des nouvelles boutiques en 2022, nous avons pour projet de diversifier la production de la ferme de La Commanderie située à Puylaroque dans le Tarn et Garonne. C’est une ferme bio de 90 hectares qui fonctionne en polyculture élevage, et que nous allons transformer en lieu de vie et de formation pour nos équipes, mais aussi en lieu d’expérimentation pour la Récolte. Nous travaillons sur l’implantation d’un élevage de poules pondeuses, d’un atelier de maraîchage et d’outils de transformations directement à la ferme. La farine que nous vendons à La Récolte et utilisons pour nos recettes provient d’ailleurs directement de cette ferme.

L’avis de FoodBiome :

La Récolte reconnecte les urbains à la Terre au travers de leurs trois activités : 

Par le déploiement et l’animation de leurs points de vente, ils établissent un lien direct entre le producteur et le consommateur, lui donnant accès à une offre de produits sains pour s’alimenter au rythme des saisons. Leurs boutiques sont une clé d’entrée pour transmettre les savoir-faire de la campagne vers la ville et permettre aux populations urbaines de changer leurs habitudes alimentaires. Au travers de leur sourcing, ils valorisent les agriculteurs engagés, leurs savoir-faire, et les initiatives qu’ils prennent au sein de leurs exploitations en faveur d’une agriculture plus durable. Enfin ils contribuent au changement des habitudes alimentaires des urbains par le prisme de la culinarité, en leur redonnant l’envie de cuisiner des légumes parfois oubliés, en les inspirant via des idées de recettes et en leur proposant une offre de restauration à emporter adaptée à leurs nouveaux  besoins. Cuisiner les produits est un paramètre indispensable pour révéler leur goût, exprimer leur terroir, et ainsi reconnecter l’alimentation à son territoire.

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