Edenn, un écosystème vivrier au nord de Toulouse

Entretien avec Jean Baptiste Assouad, Coordinateur du tiers lieu Edenn

espace de coopération et d'expérimentation à la nature urbaine

Bonjour Jean-Baptiste, peux-tu nous présenter Edenn et nous expliquer comment le projet s’est monté ?

 

Oui avec plaisir ! Le projet a été créé en 2021 suite à l’appel à projet Dessine moi Toulouse lancé en 2018 par la Métropole pour lequel nous avons été lauréat. Il visait à développer différents lieux totémiques pour promouvoir l’agriculture en ville. Quatre structures se sont ainsi regroupées (Synethic, Terreauciel, À Croquer et la Milpa – on rentrera dans le détail de leurs activités ultérieurement), pour développer un éco lieu d’1,7 ha, sur un foncier situé au nord est de Toulouse, dans un quartier prioritaire de la ville. 

Le site regroupe différentes structures  engagées, qui répartissent leurs activités selon 3 espaces : 

  • Des espaces de productions agricoles, pour du maraîchage local principalement, qui comprennent des solutions de compostage
  • Des espaces logistiques et de stockage alimentaire pour des associations et distributeurs locaux
  • Des bureaux pour l’accueil des différentes structures de l’écosystème
illustration d'un projet de tiers-lieu Edenn
Source : site internet d'Edenn

Ces différentes structures engagées que tu évoques, quelles sont-elles ?

Aujourd’hui Edenn c’est un écosystème de 12 structures, entreprises et associations, qui œuvrent en faveur d’une agriculture et d’une alimentation locale, durable, et socialement juste.

Les 4 structures “mères” du projet sont toujours présentes : 

  • Synethic : une entreprise de conseil RSE aux entreprises et collectivités, qui incube différents projets engagés (dont Edenn).
  • Terreauciel :  un bureau d’étude spécialisé dans l’agriculture urbaine et le paysagisme, qui a notamment mis en place sur le site 1 500 m2 de “carrés maraîchers”, à destination des citoyens. C’est un modèle qui propose aux familles de louer des bandes de productions légumières (2,5 m de longueur pour un abonnement de 9€/semaine), qui sont plantées et gérées par un maraîcher professionnel. Ce dernier forme les familles au petit entretien des parcelles, afin qu’ils puissent s’investir pendant la production, puis récolter les légumes pour leur consommation.
  • La Milpa  : une association qui développe des potagers sur des friches urbaines, en permettant l’insertion de personnes éloignées de l’emploi.
  •  A Croquer : un service de livraison de fruits de saison pour les entreprises toulousaines

Depuis, d’autres structures ont rejoint le collectif, sur différents projets de la fourche à la fourchette. 

Sur le volet agricole on a Pousses Ô Abris  qui développe des pépinières participatives, la Ferme de Borde Bio, dernière ferme de l’intra-rocade toulousaine et qui approvisionne certaines structures d’aides alimentaires, et différents acteurs qui expérimentent des solutions de compostage, comme Récup Occitanie et Humus & Associés. Sur le volet alimentaire, les équipe du réseau VRAC – Vers un Réseau d’Achat en Commun nous ont également rejoint et distribuent des denrées dans 5 QPV toulousains, et Ultramarinos Ana propose des produits franco-espagnols zéro déchets et sourcés en circuits courts.

En tout, c’est une cinquantaine de personnes qui travaillent au quotidien sur le site.

Je suppose que cet écosystème est plutôt propice aux collaborations ?

 

Complètement, et c’était vraiment le but en constituant ce collectif. Edenn dispose d’un statut associatif qui garantit le partage de la valeur du projet et des prises de décisions communes (chaque structure à le même nombre de voix peu importe sa taille). 

De nombreux échanges de services, de biens ou d’informations, ont lieu au quotidien sur le lieu mais également ailleurs dans Toulouse. Par exemple, les déchets verts qui sont générés sur le site permettent d’alimenter les composteurs, pour amender ensuite les différents projets agricoles (maraîchage, pépinière etc). Un autre exemple sont les locaux dédiés au stockage alimentaire, qui sont partagés par VRAC, À Croquer et Ultramarinos Ana, et la Milpa afin qu’ils mutualisent les chambres froides notamment.

Ces collaborations permettent à tout le monde d’enrichir ses activités respectives, d’économiser pas mal de temps et de moyens, et d’avoir une vraie force de frappe sur le territoire. En 3 ans, on s’est bien implanté localement et on est en mesure de dialoguer et de travailler avec beaucoup d’instances, que ce soit d’autres acteurs du monde agricole, des acteurs économiques et associatifs locaux ou encore des collectivités. On est notamment intégrés dans quelques groupes de travail portés par la ville sur des thématiques ESS,  agricoles ou alimentaires (on fait partie du collectif Toulouse Métropole Impact en tant que lieu-totem de l’ESS, et on est inscrit dans le Projet Agricole et Alimentaire Métropolitain par exemple).

J’ai vu que vous étiez aussi inclus dans la démarche de sécurité sociale de l’alimentation, peux-tu nous en dire un peu plus ?

 

On voit fleurir un peu partout sur les territoires des projets de Caisses Citoyenne d’Alimentation (voir notre article sur la Caisse Alimentaire Commune de Montpellier), qui correspondent à des regroupements de citoyens, volontaires pour développer une économie alimentaire locale et solidaire. Les caisses permettent aux participants de recevoir tous les mois un certain montant à dépenser pour leurs achats alimentaires auprès d’enseignes répondant à des critères choisis collectivement. Cela permet de favoriser et soutenir des producteurs et distributeurs locaux et engagés.

A Toulouse, la réflexion est menée sur la création de 3 caisses, dont les collectifs citoyens (incluant habitants et producteurs) sont en train de se structurer. Au sein d’Edenn, on participe à la mobilisation des citoyens et à leur formation, de sorte à ce qu’ils s’approprient le projet, et définissent eux même leur gouvernance, critères de sélection pour les produits, débouchés partenaires, puis le prix de la cotisation etc. La première caisse devrait se lancer d’ici le mois de juillet.

réunion de l'écosystème

Que peut-on vous souhaiter pour la suite ?

 

A court terme, on souhaite continuer de faire vivre notre lieu au nord de Toulouse, et travailler à son aménagement pour recevoir encore plus de public. On va démarrer plusieurs partenariats avec des acteurs locaux, notamment le programme « Sauvons les arbres », qui réemploi des arbres issus de chantiers de démolition, ou encore des instituts de recherche pour chiffrer l’impact concret et les bénéfices de l’agriculture urbaine sur les territoires.

Et d’ici quelque temps, on serait ravis de pouvoir dupliquer le modèle Edenn ailleurs, passer à l’échelle les activités existantes et en développer de nouvelles en lien avec l’alimentation responsable (on souhaiterait par exemple disposer d’une plateforme logistique plus importante pour les activités d’A Croquer et VRAC).

L’avis de FoodBiome : 

Réintroduire de l’agriculture au cœur des villes représente un enjeu crucial pour préserver des îlots de fraîcheur et recréer du lien entre les citadins et le vivant. L’écosystème créé par Edenn rappelle l’importance de préserver et de recréer des espaces naturels dans les centres urbains, et démontre le pouvoir du collectif, en créant des synergies entre différentes structures, entreprises, associations, collectivités et monde agricole, au service de projets résilients,  de la fourche à la fourchette.

En savoir plus sur Edenn, visitez leur site internet.

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